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1er Wwoofing chez les Griffin !

Voilà deux semaines de Wwoofing écoulées à Good Earth Gardens and Berries, petite ferme commerciale de fraises située juste avant le village de Glenboro. Nous sommes arrivés chez Pamela et John Griffin dimanche 4 Juin en début d’après-midi. John nous attendait tout sourire devant sa maison.

John est un homme dans la cinquantaine. Très posé dans sa manière de parler, il ponctue ses phrases du « eh » caractéristique du coin et ses réponses sont souvent réduites à un simple « humhum » qui peut vouloir dire tout et son contraire. Ses cheveux bruns rebiquent en grandes boucles sur son front et ses yeux semblent perdus derrière ses grandes lunettes. S’il n’était pas sincère, son sourire, qu’accompagne un haussement de sourcil singulier, pourrait être inquiétant. Pamela est une femme très occupée pour ne pas dire débordée. Elle s’occupe de la ferme et des enfants quand John s’en va travailler à Winnipeg en semaine. Entre les corvées aux champs, nourrir les animaux, les corvées ménagères et les activités des enfants, elle n’a littéralement pas une minute à elle. De temps en temps elle s’octroie un soupir en baissant la tête. C’est un moment étrange où tout s’arrête. Elle qui porte tout à bout de bras, si elle craque, tout s’effondre.

Les enfants sont charmants, bien que rois. Le petit monde de la ferme tourne autour d’eux. Les pièces de la maison, sans exception, sont remplies de jouets depuis le sol jusqu’au plafond. Le jardin aussi, entre le trampoline et le matériel de baseball. Lucy, 6 ans, est la plus jeune. Petite tête blonde à croquer, elle sait très bien faire ses yeux de cocker pour obtenir ce qu’elle veut. Evan, 8 ans, est passionné de baseball et de starwars aussi. Quand il ne tape pas dans des balles, il passe son temps à embêter Lucy jusqu’à ce qu’elle pleure. C’est Anna, 12 ans, la plus âgée qui fait la police comme elle peut. Passionnée de chant qu’elle pratique régulièrement à la chorale ou en tondant la pelouse, elle aime aussi jouer du ukulélé et confectionner ses propres bijoux. Les enfants sont scolarisés à la maison. Ils ne travaillent jamais à la ferme et aident très peu dans les tâches ménagères. Il semble que ce soit une volonté des parents : pas de travail s’ils n’y prennent pas de plaisir. Ainsi, pendant que nous sommes le dos courbé dans les champs de fraises pendant des heures, ils nous regardent, commentent notre travail en nous rappelant de nous appliquer et nous demandent régulièrement dans combien de temps nous prendrons une pause pour les accompagner à sauter sur le trampoline.

Il y a aussi les autres habitants de la ferme : Luna, une chienne adorable de 2 ans qui agit comme si elle en avait 9 ; Sandy, un chat chasseur de câlins qui nous attrape les jambes avec ses pattes quand il en veut encore et nous mord de plaisir ; et Munje (Zombie en albanais) le seul survivant de 3 poussins qui ont passé la nuit dans la tempête sous une pluie battante. Il y a aussi des poules qui donnent des œufs chaque matin (more eggs !) et des lapins mais nous n’avons pas vraiment eu l’occasion de faire connaissance…

Un jour, pendant le lunch, Pam reçoit un appel d’une amie qui vit à Glenboro : elle vient d’apercevoir un ours dans son jardin ! Il serait parti vers le centre-ville. Branle-bas de combat ! Tout le monde se précipite dans la voiture. Mission : trouver l’ours ! On tourne un moment dans les rues de Glenboro quand soudain, on aperçoit un attroupement de personnes. Le voilà ! C’est un jeune ourson. Confortablement assis sur une branche, il s’est réfugié dans un arbre. Un agent de la conservation de la faune est présent et dès que l’animal fait mine de descendre il lui crie de remonter : « Up ! Up ! Good bear… good bear… ». La foule tient ses distances appareil photo à la main. L’agent, lui, est armé d’un fusil gros calibre au cas où l’animal se mettrait à courir vers nous. Aurait-il besoin d’un tel armement si nous n’étions pas là ? Il attend ses collègues qui doivent amener un tranquillisant qui permettra d’endormir l’ours et de le récupérer sans danger. L’attente est longue… Plusieurs fois nous avons peur pour l’ours qui descend de son perchoir et défie l’agent. Il parvient plusieurs fois à s’échapper, change d’arbre et de jardin !

Quand enfin le tranquillisant arrive, les agents de la faune entourent le perchoir de l’ours avec des tapis. Ils fixent le produit au bout d’un long bâton, parviennent à toucher l’ours et… BOUM ! Dans un grand fracas, l’ours tombe inerte de sa branche. Ils se mettent à 4 pour charger l’animal dans un grand baril qui servira à son transport vers une réserve faunique ou un parc provincial.

Très vite la foule se dissipe et nous rentrons travailler à la ferme, encore abasourdis par l’étrange scène que nous venons de vivre !

Notre travail principal depuis 2 semaines consiste à faire la chasse aux dandelions (pissenlits) et aux thistles (chardons) dans les champs de fraises. Une tâche sans fin puisque, aujourd’hui, 10 jours depuis le premier dandelion arraché, nous n’avons encore pas fini ! A cette tâche quotidienne s’ajoute la fabrication du pain tous les matins. Un pain maison, cuit au four, délicieux ! De temps en temps, d’autres tâches viennent rompre la monotonie comme réparer un enclos ou préparer le repas.

Après notre travail du jour, nous sommes contents de retrouver un peu d’intimité dans la cabane au fond du jardin. C’est une cabane à charpente en bois recouverte de tôle. Une architecture sommaire qui a pour avantage de faire résonner les gouttes de pluie qui tombent sur le toit. Une fenêtre donne sur le backyard : on rêvasse en regardant les champs le jour et les mouches à feu la nuit.

Notre contrat, c’est 5h de travail par jour pendant 6 jours et 1 jour off pour profiter des environs. Nous avons donc souvent une moitié de l’après-midi à nous dont nous profitons (trop rarement car fatigués) pour aller se baigner à la rivière Assiniboine ou marcher dans les dunes de Spruce Woods. Surnommé dans la région « Spirits Sands », en l’honneur des Premières Nations qui y voyaient un lieu spirituel, c’est un ancien delta sablonneux formé par l’accumulation de roches charriées par les eaux de fonte d’un glacier, il y a plus de 15.000 ans. Quand les eaux se sont retirées, les sables sont devenus visibles sur plus de 6500 km². Aujourd’hui la végétation a tout envahi pour ne plus laisser que 4km² de sable nu.

Pour notre premier jour off, nous sommes allés à Winnipeg, la capitale du Manitoba. Sur le chemin, magnifique coucher de soleil, comme tous les soirs depuis que nous sommes arrivés au Manitoba ! Nous passons la nuit avec Elmy sur le parking d’un Wallmart (seul supermarché en Amérique du nord qui autorise les véhicules à se garer pour la nuit). Le matin, un café pas fameux et visite du Musée des Droits de la Personne. Un musée absolument génial qui retrace, dans le Canada et dans le monde, les évènements qui ont façonné ce que les droits humains sont aujourd’hui. On y retrouve des évènements tragiques majeurs (holocauste, génocides…). On y apprend aussi par exemple que les canadiens d’origine japonaise ont été déportés dans des camps de travail au Canada pendant la 2ème guerre mondiale car ils représentaient un danger potentiel pour la nation (quand certains d’entre eux étaient nés au Canada et n’avaient jamais connu le Japon) ; ou encore que les enfants des populations autochtones du Canada étaient arrachés à leur famille pour être mis dans des « residential schools », sorte de pensionnats catholiques où ils étaient abusés et torturés au nom de l’ « assimilation ». Un génocide culturel que le Canada n’a reconnu que très récemment. On est sorti un peu choqué, avec un peu plus de recul sur l’idée que l’on se faisait du Canada, terre de libertés. Ce musée était vraiment passionnant : il nous aura fallu 5 heures pour en venir à bout.

On a voulu privilégier la nature pour notre 2ème jour off, en allant au Turtle Moutain Provincial Park, au sud-est de Glenboro. Ce parc à la frontière des Etats-Unis s’est avéré être un parc hivernal surtout dédié au skidoo (motoneige) et à la chasse. Nous avons donc randonné sur des chemins avec l’herbe jusqu’aux genoux. Après quelques petites heures apaisantes mais fatigantes, nous repartons et nous prenons un café à Boissevain, jolie petite ville aux résidences cossues. C’est aussi le moment de compter les tiques que nous avons ramenées de notre balade : 30 au total !

Bien que courtes, ces journées off nous permettent de prendre un peu de recul sur la frénésie de la ferme. Entre notre travail et les enfants très demandeurs, les journées sont bien remplies et nous n’arrivons pas vraiment à trouver notre rythme. De plus, nous avons un peu eu l’impression de faire partie d’une grosse vague de wwoofeurs. Les enfants, habitués à ce fonctionnement, préfèrent d’ailleurs nous appeler « les wwoofeurs » que par nos prénoms.

Comme nous attendions du courrier, nous avons prolongé notre séjour de quelques jours. On passe de bons moments avec la famille notamment le jour de la fête des pères qui a des airs de Thanksgiving quand nous nous retrouvons autour d’une dinde pour dîner ; ou encore, notre dernier matin où les enfants improvisent un Tea Party, excuse parfaite pour déguster des cookies maison et boire du thé sucré à 11h du matin. Nous recevons enfin notre colis et habillons Elmy. Après un dernier concert improvisé avec les enfants, nous reprenons la route à bord de notre van coloré !

Les caribous voyageurs
Dessin réalisé par Elodie Das Neves
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